Trouver quoi dire, les mots difficiles
C'est l'instant des nuits carrillones, ce moment où tout commence dans le flou du noir aux fenêtres où rien ne passe. C'est le T lorsqu'il y a des mots que je ne dis pas à l'intérieur de moi qui se révoltent.
Minuit, l'heure du crime.
Elle sait bien pourtant, mais je ne lui dis pas. Je n'ai rien dit d'autre qu'un stupide arrête égoïste, je me suis retenue au s'il te plaît. Puis tout est sorti en vrac. Les joues brûlantes de l'eau salée dans un lieu inconnu. Rien à serrer. Rien à regarder. Rien pour se faire rassurer qu'un petit mais elle pleure. Deux frimousses enfantines, des yeux inquiets et d'autres affolés. J'ai juste un petit peu peur. Et je ne sais pas la rassurer. Je ne sais même pas si elle le veut. L'incapacité. La fureur.
Des éoliennes lointaines bougent des bras blancs, la vue trouble et le souffle en cascade. Reprendre une bonne figure. Ne surtout pas penser. Et la petite dans les jambes qui s'accrochent arrête, ne pleure plus. Ah bah oui, c'est si facile à dire. Mais moi j'ai juste peur. Et en fait je n'y connais rien. Je suis une incapable face à son propre chagrin. Pas l'habitude il faut dire. La blindée, l'écorchée vive de l'intèrieur, celle qui ne dit rien mais dont il faut tout deviner par petites touches limpides. Alors avancer à pas menus pour la découvrir et tomber sur ça. Sur ses barrières qui s'effondrent. En être autant choquée que la nouvelle du jour. Et s'en sentir toute petite et minable de ne pas avoir vu tout ce qu'elle renfermait.
Les manèges sont terminés. Le poker a été replié. Il faut maintenant compter les tours gagnants et les jetons à la caisse. Corps déployés de mille et une douleur. Une seule, toute petite. Qui se cache, elle aussi. La méchante. A l'intérieur elle fait son chemin, elle se creuse. Et j'ai peur. Parce qu'alors si elle enlève ses barrières, tout va lui être mangée de l'intérieur, toutes ses défenses qu'elle a accumulé au fil des ans seront noyées par les flots internes. Et j'aurai beau ramer, rien ne sera plus pareil.
Alors je ne pense pas à mes sourires frigides et mes bras qui se retiennent toujours de la toucher quand elle, elle le fait, parce que j'ai peur de la casser. Et de me casser, à mon tour. Les mille morceaux épars dans le vent, par la fenêtre, comme la volute d'une fumée qui se sépare de ma bouche.
Alors je te demande pardon d'avoir fermé les yeux. Dorénavant, ils seront grands ouverts. Même si parfois ils baigneront un peu dans le flou des flots des paupières combatives au moindre mouillé qui pourrait surgir entre mes cils.
~ Oreille ~ Intermezzo bright violet euphoria ~ Cinema Strange