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N E X T E X I T
4 septembre 2008

Sous la pluie

Il fait tout gris. Il fait de la pluie. Il fait froid.
Et j'aime ça.

J'égoutte enfin mes chaussettes et j'écoute Vincent Delerm.
Je suis emmitouflée dans un gros pull, bas de pyjama parce que mon jean est trempé aux chevilles, une grosse écharpe, et j'ai un petit sourire au-dessus de La Princesse de Clèves.

Je suis une bourgeoise dans mes murs blancs, mes jolies tables, mes rideaux de théâtre, mes encens d'Artisans du Monde, mon thé des Amants Rouges et je me souviens.

Quand le matin on sortait du portail bleu, qu'Alexandre courrait pour ne pas nous rater, qu'on déposait Clément à l'abri bus et qu'on portait à La source en écoutant France Inter et que je craquais.
Maman, tu veux pas mettre de la musique ?
Doudou je trouve plus mon truc à lèvres.
Alex t'as fait l'anglais ?
Tu crois vraiment qu'Ibsen c'est moderne ?
Maman, mets de la musique, je me fous des infos !

Et puis y'a Vincent Delerm quand il fait gris. Les Têtes Raides quand le soleil joue avec les nuages. Rachid Taha si le soleil étincelle dès le matin. Et s'il pleut c'est Yann Tiersen.

Je voudrais bien encore aller au lycée, me poser les pieds sur la chaise d'à côté en cours de philo, m'entendre dire que je suis qu'une chieuse, comprendre où je vais, regarder d'un air sceptique ce même prof en chaussettes roses et ceinture crocodile immonde, dire que la philosophie c'est de la masturbation intellectuelle, voir Woody Allen ou les Monthy Pithons en cours d'anglais, lire Sarah Kane et jouer Novarina les pieds en l'air sur la moquette noire de la salle de théâtre, crier Shakespeare, stipuler sur l'intellect de Molière, En attendant Godot et Pour un oui ou pour un non ou même Dans la solitude des champs de coton, allongée sur les tables à refaire le monde en riant les couettes de chaque côté de la tête, sortir de cours en claquant la porte au nez de la prof d'histoire-géo, parce que vraiment ouais, c'est qu'une sale conne homophobe, la tête dans Vite, Vite, Lent et les oreilles dans les rires de France Gall, tomber amoureuse de Björk, croire qu'on a toute la vie devant soi.

Au lieu de ça, je me retrouve à être blasée, à vouloir pleurer dans le bus quand Anthony and The Johnsons me crie que je suis sa soeur, et entendre quand même la vieille en face dire qu'il faut garder son sac bien contre soi parce qu'il y a des voleurs, ça me chagrine oui la connerie des citoyens que je suis obligée de cotoyer, alors je m'isole dans un café et Madame de Lafayette m'emmerde avec ses que qui quoi, son style un peu lourd à l'histoire jolie, mais c'est pas trop grave, j'écoute la pluie et j'ai froid.

Je le sais, maintenant, j'en suis certaine, j'ai perdu toute ma croyance en l'humain, l'humanité qu'il me reste, je la garde jalousement enfermée à double tour dans mon coeur, mes pleurs sous la pluie, on les voit pas.

C'est parfait comme ça.


Découvrez Vincent Delerm!

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